Concours La bibliothèque Hergé, dans le quartier de Stalingrad à Paris, et l’association LABOmatique, qui propose des ateliers audiovisuels, sociaux ou éducatifs, ont accompagné des groupes d’enfants dans le cadre du concours « Patrimoines en poésie » ; ils ont reçu deux fois des prix du jury. Découvrez leurs témoignages.

Comment est né votre projet de mener des ateliers dans le cadre du concours « Patrimoines en poésie » ?

Marine Métayer, bibliothécaire à la bibliothèque Hergé (Paris 19e) : Le projet « Patrimoines en poésie » de 2024 a été porté par ma collègue Claire Rocchi-Brazzini, également bibliothécaire, et moi-même. Nous avons travaillé avec Sarah Klingemann, de l’association LABOmatique. 

Les enfants viennent presque quotidiennement à la bibliothèque Hergé, qui est une bibliothèque de quartier, pour se retrouver et participer aux ateliers proposés. Toutefois, le terme d’ « atelier d’écriture » peut susciter de l’appréhension et freiner la participation. Nous avons dû les convaincre de participer ! Lever ces barrières mentales est un aspect important et essentiel de notre métier. Notre motivation est grande car nous savons qu’une fois le stage passé, ils sont toujours heureux d’y avoir participé.

Travailler en partenariat avec Sarah Klingemann autour du son, de la photo et de la vidéo les a encouragés à participer. Un groupe de cinq enfants, Md’Ayman, Cissé, Sofia, Saliou et Mila, a donc participé à un stage de quatre jours durant les vacances de la Toussaint. Ils avaient environ 10 ans, étaient pour la plupart en classe de CM2 et habitaient le quartier. 

Qu’est-ce que le concours a apporté aux enfants ?

M. M. : Cette expérience leur a permis de redécouvrir leur quartier et de porter un regard différent sur son patrimoine. Ils y grandissent, mais comme beaucoup de Parisiens — enfants comme adultes — ils oublient parfois de regarder ce qui les entoure. Grâce au travail d’écriture poétique, ils ont développé leur créativité et créé de nouveaux liens avec ce territoire. Par exemple, en 2024, nous avons travaillé sur la Rotonde de Stalingrad : c'est un bâtiment qu’ils voient tous les jours. Ils ont pu le visiter, monter sur ses balcons et redécouvrir le paysage environnant. 

Quelle est votre démarche pédagogique et artistique ?

Sarah Klingemann (LABOmatique) : Les ateliers que nous proposons visent à sensibiliser les jeunes à l'architecture et l'urbanisme, en leur faisant réaliser de petits films. Chaque projet inclut une visite guidée par un spécialiste, qui les aide à mieux comprendre les lieux et à les filmer sous différents angles. En 2023, nous avons mené un parcours allant de la Halle Pajol (Paris 18e) au square Françoise-Hélène-Jourda et au Jardin d’Éole (Paris 19e). Le stage s’est déroulé en deux temps : une balade avec prises de vue et de son, accompagnée d’échanges sur ce que nous observions (mobilier urbain, végétation, bâti, ambiance sonore, commerces, circulation…), puis un temps de prise de notes. Chaque enfant a photographié et enregistré les sons du lieu qui l’intéressaient particulièrement. Ils ont également rencontré l’architecte Mohaman Haman, qui leur a présenté la « case obus des Mousgoum du Cameroun » (Paris 18e), une construction traditionnelle en terre crue, avant de participer à un atelier sur la terre. Pour l’atelier sur la Rotonde, Solène Mourey, architecte et urbaniste, directrice adjointe du Conseil d’Architecture, d’Urbanisme et de l’Environnement de Paris, est venue commenter une visite filmée par les enfants. Ils ont également échangé autour d’un corpus de livres de la bibliothèque sur la ville, l’architecture et Claude-Nicolas Ledoux, architecte de la Rotonde. Ensuite est venu le temps de l’atelier d’écriture, avec des jeux de mise en route sur les sonorités, des cadavres exquis, une boîte à mots, l’emploi de l’écriture automatique... Tout cela a constitué une matière à utiliser pour le passage à l’écriture. Enfin, nous avons finalisé l’enregistrement sonore et le montage.

M. M. : Nous avons fait un stage de quatre jours, avec des séances de trois heures par jour. C’est très intensif ! L’idée était que les enfants fassent le plus possible par eux-mêmes et que chacun et chacune puissent faire de la photo, de la vidéo et de la prise de son. 

Quels défis avez-vous rencontrés au sein du projet, et comment ont-ils nourri votre approche ?

M. M. : Inciter les enfants à participer a été le plus difficile car le projet s’inscrivait dans un temps long (quatre jours) ; ils sont habitués à des ateliers courts, d’une heure ou deux. Par ailleurs, les termes d’ « écriture » et de « poésie » leur rappellent l’école. Mais une fois l’atelier commencé, ils se sont rendu compte que le projet était vivant, participatif et ludique. A chaque fois, les enfants en sortent contents et enrichis.

Ensuite, la partie dédiée à l’écriture a été complexe : affronter une page blanche n’est jamais facile, ni pour un enfant, ni pour un adulte. Ils ont rapidement su mobiliser leur créativité et réussi à écrire leur poème dans le temps donné.

Pour ma part, je suis toujours émerveillée de leur inventivité et de leurs talents créatifs, que ce soit sur la partie plastique ou poétique. Ils ont toujours beaucoup d’idées, et parfois, ils n’osent simplement pas les formuler à l’écrit. Les encourager est essentiel car on observe surtout un manque de confiance chez certains et certaines d’entre eux. Nous ne sommes pas l’école ; notre démarche est différente du cadre scolaire. Nous souhaitons les accompagner pour qu’elles et ils s’autorisent le plus librement possible à être dans une démarche créative et à explorer toutes les possibilités artistiques qu’elles et ils ont en eux. Et surtout, qu’ils s’amusent à le faire ensemble !

Un dernier mot ?

M. M. : Avoir été récompensés pour ce travail créatif a fait très plaisir aux enfants, et les a sans doute rendus fiers. En tout cas, nous, nous sommes très fières du travail qu’ils ont accompli et de leur investissement.

Nous remercions Sofia, Cissé, Saliou, Md’Ayman et Mila qui ont bien voulu participer au concours, et leurs familles. Merci également à la Région Île-de-France et à la Drac Île-de-France pour cette belle initiative ! Le projet s’est prolongé à l’occasion des Journées européennes du patrimoine car deux enfants ont pu présenter leur vidéo avec Sarah Klingemann au public de l’espace Niemeyer (Paris 10e).

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