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Bap! Au cœur de l’École nationale d’architecture de Versailles, l’exposition « 4 °Celsius entre toi et moi » est une installation à ne pas manquer pour les visiteurs de la Biennale d’architecture et de paysage (Bap!) de la Région Île-de-France, qui se tient à Versailles (78) jusqu’au 13 juillet. Pour décrypter les enjeux donnés à voir par ce travail, nous avons rencontré la co-commissaire de l'exposition, Sana Frini.

En 2100, un climat subtropical devrait remplacer le climat tempéré de Paris et sa Région. Les architectes Philippe Rahm et Sana Frini ont été sélectionnés comme co-commissaires de la 3e édition de la Biennale d’architecture et de paysage (Bap!) pour imaginer comment y faire face.

Ensemble, ils ont conçu l’exposition « 4 °Celsius entre toi et moi » présentée à l’École nationale supérieure d’architecture de Versailles (78). Ils nous proposent de (re)découvrir des architectures traditionnelles, inventées bien avant la climatisation, et des solutions destinées à adapter nos villes à un climat plus chaud. Sana Frini, aussi co-fondatrice de l’agence mexicaine Locus, nous partage sa vision de l’architecture.

Quel est le point de départ de l’exposition « 4 °Celsius entre toi et moi » ?

Sana Frini : Philippe Rahm et moi nous sommes associés pour présenter un projet commun autour du thème de la Bap! de cette année : « la vi(ll)e vivante ». Nos travaux ont pour lien le développement durable et nous avions à cœur de sensibiliser aux évolutions climatiques et aux transformations urbaines qu’ils imposent.

Nous sommes partis de la déclaration de l’ancien ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu, qui annonçait une hausse moyenne de 4 °C des températures en France. Bientôt, un climat semblable à celui de Mexico et de Tunis aura cours à Paris. Cette « bande thermique » de 4°C supplémentaires remonte au fur et à mesure vers le nord et interroge : comment adapter nos villes de façon rapide et résiliente ?

Crédit photo : © DR
Sana Frini

Comment avez-vous abordé ce sujet ? 

S. F. : L’adaptation des villes aux réalités locales est un enjeu central de l’architecture de demain. Chez Locus, nous nous intéressons aux pratiques vernaculaires, en particulier du Sud global, c’est-à-dire des méthodes de construction en adéquation avec les territoires et les modes de vie. Fondées sur la disponibilité des ressources, ces techniques intègrent une dimension climatique, notamment via des alternatives au chauffage ou à la climatisation. Nous avons eu l’idée de rassembler des architectes contemporains et en devenir pour réfléchir à cette thématique du climat qui façonne nos villes. Une douzaine d’universités du monde entier ont participé à la réflexion, en revisitant les savoirs millénaires du sud. En parallèle, une soixantaine d’architectes ont partagé leurs travaux, considérant le climat comme outil de design.

Crédit photo : © Rafael Gamo

Comment l’exposition a-t-elle été pensée ?

S. F. : Nous avons souhaité proposer une visite immersive pour faire comprendre au visiteur l’aspect pratique de l’architecture, au-delà de son esthétisme. Le visiteur entre d’abord dans le « Manifeste », une pièce où la température est plus chaude de 4 °C, reproduisant les conditions du futur. De part et d’autre, deux films sont projetés : au nord, celui du cinéaste tunisien Younez Ben Slimane et au sud, celui de l’espagnol Manuel Munoz Rivas. C’est un dialogue entre deux personnes qui vivent ce futur climatique. Le visiteur traverse ensuite la « Database », un sas de décompression qui expose les données scientifiques et les projections, avant d’arriver dans la nef centrale, cœur de l’exposition.

Nous ne voulions pas tomber dans le storytelling de fin du monde, mais plutôt adopter un discours positif et axé sur les solutions. La nef est scindée en 3 sections : le passé, le présent, le futur. Chaque temporalité est structurée autour des 4 éléments – la terre, le feu, l’eau et l’air – pour regrouper problèmes et propositions architecturales. Le passé prend la forme d’un cabinet de curiosités mêlant géologie, histoire et culture du Sud. Le présent présente les œuvres d’architectes contemporains issus de climats chauds. Enfin, le futur dévoile les propositions de 15 architectes primés, imaginant un Paris soumis à des chaleurs et des précipitations extrêmes.

En fin de visite, des concepts phares sont présentés. Pouvez-vous nous en parler ? 

S. F. : En effet, la section finale, intitulée “ Prototype ”, met en lumière 2 installations emblématiques. The Mud Trianon d’Andrés Jaque revisite les dolia, des jarres d’argile millénaires enfouies pour conserver la fraîcheur, en exploitant l’inertie thermique. Le public peut en faire l’expérience en allant à l’intérieur et en touchant les bords. En face, le Windcatcher du collectif C733 présente 6 cheminées capables de chauffer ou rafraîchir un espace, selon les conditions. Ces 2 prototypes proposent des solutions tangibles d’adaptation en mobilisant les ressources et les phénomènes naturels.

Quelle portée souhaitiez-vous donner à cette biennale ?

S. F. : Il nous semblait crucial de ne pas esquiver la réalité : cette biennale présente une génération d’architectes pleinement consciente de sa condition anthropocène, qui crée à partir des limites imposées par l’environnement. Le soleil, devenu facteur déterminant, structure désormais les propositions architecturales, tout en tenant compte des particularités locales.

Plus largement, nous ne voulions pas nous cantonner au domaine architectural. Nous avons sorti un catalogue « 4°C entre toi et moi » pour laisser une trace concrète, et nous avons publié un livre de littérature climatique avec 12 auteurs spécialisés. L’enjeu de cette exposition est de travailler main dans la main, Sud-Nord, et de s’inspirer de la résilience des savoir-faire architecturaux, issus de cultures ancestrales, pour imaginer des solutions globales adaptées aux défis du réchauffement climatique

Cap sur la Bap!

Du 7 mai au 13 juillet 2025 à Versailles, la 3e édition de la Bap! vous propose conférences, débats, ateliers participatifs et expos sur le thème de « la ville vivante », qui s'adapte aux changements climatiques tout en préservant le vivant. L'ensemble de la programmation est entièrement gratuite.

Crédit photo : © Hugues-Marie Duclos

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